Aux Etats-Unis, l’astrologie est peut-être une industrie florissante, mais elle n’en demeure pas moins passablement artisanale, plus proche du rebouteux du xvine siècle que d’une multinationale moderne. Des milliers d’astrologues c-offrent leurs services, tantôt sur le pas de leur porte. tantôt dans d’innombrables livres qui encombrent toutes les librairies de quartier, tantôt encore dans une abondante moisson d’articles de journaux. Mais un nombre étonnant d’entre eux se contentent d’attirer leur clientèle par de simples petites annonces de trois ou quatre lignes qu’ils font paraître dans les journaux et revues du pays.

Le secret du succès et du bonheur se trouve dans les étoiles. N’hésitez plus ! Ecrivez tout de suite à Naru !… 3 dollars. »

« Interprétations astrologiques… Résultats remarquables… Soeur Anne… Téléphonez ou écrivez… 3 dollars. »

« Astrologue psychique formé en Inde. Mère Ora vous révèle votre avenir à distance. Réponse par retour du courrier. Ecrivez aujourd’hui même. 4 dollars. »

Même s’il cherche vraiment « le succès et le bonheur », ou simplement des « résultats remarquables », qui peut bien se fier aux services d’un Naru, d’une soeur Anne ou d’une mère Ora ? Même les partisans les plus convaincus de l’astrologie douteraient qu’on puisse recevoir des indications utiles de telles sources, et à un tel prix. Pourtant, deux psychologues découvrirent avec surprise en 1968 que ces consultations à 3 ou 4 dollars n’étaient finalement pas si mauvaises. Lee Sechert et James H. Bryan limitèrent leur étude à une seule question : donner suite ou non à un certain projet de mariage. Puis ils choisirent 18 astrologues dont la publicité indiquait qu’ils se spécialisaient plus particulière-ment dans les questions matrimoniales. Ils rédigèrent alors trois types de lettres. Le premier était neutre et ne donnait que des renseignements essentiels à l’astrologue : âge, lieu et date de naissance des deux futurs, sans aucun indice sur l’état d’esprit de l’auteur de la lettre. Le deuxième et le troisième indiquaient une attitude positive ou négative de la part du client. Chaque astrologue reçut une lettre neutre et une lettre positive ou négative, sous des noms différents bien entendu.

La science s’en mêle !

A la grande satisfaction des chercheurs qui s’intéressaient surtout à la qualité des conseils donnés aux consultants, les réponses reçues évitaient presque toutes le jargon et la théorie astrologique. Loin de se contenter de consulter leurs cartes, les astrologues semblaient aussi tenir compte de l’attitude négative ou positive du client qui recourait à leurs services. Les conseils donnés, de l’avis des psychologues, étaient le plus souvent rapides, pratiques, sages, bon marché et, surtout peut-être, amicaux. A l’occasion, ils étaient aussi fort prolixes, comme ceux de cet astrologue qui, peu avare de son temps, envoya une réponse de 450 mots à une lettre et de 750 mots à une autre, pour la très modique somme de 50 cents. Un seul de ces astrologues coucha sa réponse en termes purement astrologiques, mais un autre rétablit l’équilibre en tançant son client pour qu’il « abandonne ce projet insensé. Le mariage est une chose personnelle qui ne peut être annoncée par les étoiles !